
Forger des Synergies Stratégiques : le Dialogue de Bogota comme Catalyseur pour la Collaboration Interrégionale dans l’Enseignement Supérieur
July 23, 2025
Strengthening Africa’s Research Ecosystem through Strategic Collaboration: The SANLiC Experience
July 23, 2025Du 21 au 25 juillet 2025, la ville de Rabat, au Maroc, s’est imposée comme un carrefour de vision, de dialogue et de collaboration, à l’occasion de la 16e Conférence générale quadriennale de l’Association des Universités Africaines (AUA). Organisée sous le thème inspirant « Façonner l’avenir de l’enseignement supérieur pour l’innovation et le développement durable en Afrique », cette rencontre a réuni une communauté diversifiée d’enseignants, de chercheurs, de partenaires au développement et de décideurs politiques déterminés à renforcer l’enseignement supérieur sur l’ensemble du continent.
Parmi les moments forts de la conférence figurait une session de haut niveau consacrée aux initiatives transformant l’enseignement supérieur africain, avec un accent particulier sur le Programme des Centres d’Excellence de l’Enseignement Supérieur (CEA) – une initiative multisectorielle et pluri-phasée ayant considérablement renforcé la qualité et la pertinence de la formation post-universitaire en Afrique subsaharienne. Présidée par la Professeure Theresia Kimbeng Nkuo-Akenji (Vice-Présidente de l’AUA pour l’Afrique centrale et Rectrice de l’Université de Bamenda), la session a réuni des panélistes de renom qui ont partagé leurs perspectives sur les avancées, les réalisations et les orientations stratégiques du programme. Parmi eux figuraient : la Professeure Folasade Ogunsola, Rectrice de l’Université de Lagos (Nigéria) ; le Professeur El Hadji Bamba Diaw, Directeur Général de 2iE (Burkina Faso) ; et le Professeur Richard Buamah, Directeur du Centre RWESCK (Ghana). L’Université de Lagos et 2iE abritent toutes deux des Centres d’Excellence. Les échanges ont permis de revenir sur les leçons majeures tirées au cours de la dernière décennie et d’explorer les perspectives de pérennisation et d’expansion de l’impact du programme CEA sur le continent.
Des lacunes aux acquis : le parcours transformationnel du programme CEA
Le système africain d’enseignement supérieur a longtemps été confronté à de sérieux défis : production limitée de diplômés de 3e cycle, institutions sous-financées, faible adéquation avec les besoins du marché du travail, et infrastructures de recherche insuffisantes. Pour y remédier, le programme CEA a été lancé en 2014, avec un appui financier de 657 millions USD de la Banque mondiale et 72 millions d’euros de l’Agence Française de Développement (AFD).
Reposant sur un modèle de financement basé sur les résultats, le programme a redéfini le financement de l’enseignement supérieur en Afrique, garantissant que les investissements se traduisent par des améliorations concrètes de la qualité académique, de la production scientifique et de la coopération régionale. Aujourd’hui, le CEA s’impose comme l’une des initiatives les plus ambitieuses et les plus impactantes dans le domaine.
Mme Adeline Addy, Responsable du suivi-évaluation à l’AUA, a retracé l’évolution du programme à travers ses trois phases – CEA I, CEA II et CEA Impact – et la création de plus de 80 centres dans 20 pays d’Afrique subsaharienne, axés sur dix secteurs prioritaires : santé, agriculture, énergie, TIC et développement numérique, eau et assainissement, et éducation, entre autres.
En dix ans, le programme a enregistré des avancées notables dans l’augmentation de l’offre, de la qualité et de l’accessibilité de la formation postuniversitaire tout en répondant aux enjeux de développement régional. Parmi ses réalisations majeures :
- Plus de 90 000 étudiants de master et de doctorat inscrits, dont plus de 30 % de femmes
- Plus de 400 accréditations nationales et internationales obtenues
- Plus de 10 000 publications scientifiques, dont un tiers co-rédigées par des chercheurs de différents pays, illustrant une forte collaboration régionale.
Au-delà des chiffres, le programme a favorisé des améliorations structurelles. Il a appuyé la mise en place et le renforcement de bureaux de transfert de technologie (BTT) pour transformer la recherche académique en innovations concrètes. Il a également investi dans des laboratoires et des environnements d’apprentissage modernes, offrant aux chercheurs africains les infrastructures nécessaires pour des découvertes scientifiques avancées. Par exemple, l’acquisition par ACEGID du séquenceur Illumina NovaSeq™ X Plus constitue une avancée majeure : premier de son genre dans la région, il permet de séquencer l’intégralité d’un génome humain, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour la recherche génomique et la médecine de précision en Afrique.
Au niveau national, le programme CEA a établi un modèle exemplaire. Son succès, sous un financement axé sur les résultats, a démontré des progrès tangibles en matière de responsabilité, de transparence et de performance. À ce titre, le Nigéria a franchi une étape importante en mettant en place ses propres Centres d’Excellence financés par l’État et en adoptant le modèle CEA pour renforcer la supervision et accélérer les résultats dans son secteur de l’enseignement supérieur.
Alors que le projet a officiellement pris fin en juin 2025, la pérennisation et l’amplification de ses acquis sont désormais des priorités. Cela a été souligné par Mme Namrata Tognata, Spécialiste principale de l’éducation et Cheffe d’équipe du programme CEA à la Banque mondiale, lors de son intervention. Elle a insisté sur l’importance d’une intégration institutionnelle plus profonde pour garantir un impact à long terme, appelant les universités à jouer un rôle accru dans la gestion des ressources humaines, la gouvernance, le financement et le leadership scientifique.
Elle a également présenté la vision prospective de la Banque mondiale pour l’enseignement supérieur régional, incluant la poursuite du financement compétitif, l’alignement sur les secteurs prioritaires et le maintien du financement basé sur les résultats. Elle a plaidé pour l’intégration, au sein des universités, de structures comme les pôles d’innovation et les unités de transfert de technologie, afin de renforcer les écosystèmes académiques et le développement national. Mme Tognata a aussi mis l’accent sur l’élargissement de la collaboration via des consortiums nationaux et des plateformes panafricaines.
Tout en reconnaissant les succès importants du programme, elle a rappelé la nécessité d’un accompagnement ciblé dans les domaines à améliorer, tels que la commercialisation, l’innovation et les partenariats avec l’industrie. Elle a conclu en réaffirmant l’importance de la vérification indépendante des résultats, du soutien opérationnel continu et des partenariats stratégiques comme leviers essentiels pour pérenniser et étendre le modèle CEA à l’échelle du continent.

Namrata Tognata, spécialiste principale en éducation et chef de l’équipe de travail ACE à la Banque mondiale
Perspectives : défis et engagements partagés
Malgré les progrès réalisés, des défis subsistent : barrières linguistiques freinant la mobilité régionale, décalages politiques compliquant les partenariats avec le secteur privé, et insuffisances de financement menaçant la durabilité des acquis. Le rôle crucial des gouvernements pour lever ces obstacles et la nécessité de politiques publiques favorisant l’innovation, la collaboration et la croissance institutionnelle ont été fortement soulignés.
Un appel unanime à une solidarité continentale renforcée a également été lancé. En encourageant la coopération interuniversitaire et en harmonisant les efforts à travers les pays, l’Afrique pourra mieux se positionner comme un acteur mondial majeur en matière de production de connaissances et d’innovation.
Une vision commune pour l’avenir
L’impact transformateur du programme CEA illustre clairement les avancées remarquables qui peuvent être accomplies lorsque l’investissement dans l’enseignement supérieur est priorisé et aligné stratégiquement sur les besoins de développement. Le programme CEA s’est imposé comme une force de changement à travers le continent – formant des Africains en Afrique pour relever les défis les plus pressants du continent.
À propos du programme CEA
Le Programme des Centres d’Excellence de l’Enseignement Supérieur (CEA) est financé par la Banque mondiale, en collaboration avec les gouvernements des pays participants, afin d’appuyer les établissements d’enseignement supérieur africains dans la spécialisation sur des thématiques stratégiques pour promouvoir une croissance et un développement durables en Afrique.
Lancé par la Banque mondiale, la première phase (CEA I) a démarré en 2014 avec 22 centres dans neuf pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre, suivie en 2016 de la deuxième phase (CEA II) avec 24 centres en Afrique de l’Est et australe. Ces deux premières phases ont permis de renforcer la capacité des établissements à offrir une formation de qualité, à mener des recherches appliquées et à développer les compétences nécessaires au développement du continent.
Fort de ces succès, la Banque mondiale, en partenariat avec l’AFD, a lancé en 2019 le projet CEA Impact avec 54 centres répartis dans 35 universités, dans dix pays d’Afrique de l’Ouest ainsi qu’à Djibouti, afin de renforcer davantage la formation postuniversitaire et la recherche appliquée dans des domaines existants et d’appuyer de nouveaux secteurs essentiels à la croissance économique africaine.
Dans le cadre de CEA Impact, ces 54 centres se sont spécialisés dans de larges domaines thématiques : sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM) ; agriculture ; santé ; environnement ; sciences sociales/appliquées ; et éducation – identifiés comme essentiels au développement de l’Afrique.
La mise en œuvre du programme est assurée par l’Association des Universités Africaines (CEA I et CEA Impact en Afrique de l’Ouest et du Centre) et par le Conseil interuniversitaire pour l’Afrique de l’Est (CEA II en Afrique de l’Est et australe).
En savoir plus sur le projet CEA Impact https://ace.aau.org
Facebook: CEA Impact | X (Twitter): the_ACEProject | LinkedIn: CEA Impact


